2020 : année charnière de refondation de la formation professionnelle
En effet, promulguée le 5 septembre 2018, la loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel » introduit plusieurs changements de paradigme qui vont gagner progressivement tous les secteurs de l’activité :
- Le renforcement de l’individualisation de la formation,
- La fin des critères d’imputabilité et de financement des actions de formation,
- L’ouverture de la définition de l’action de formation.
Au travers en particulier du CPF rénové et monétisé, chaque actif va gagner en autonomie et organiser son employabilité sur un marché du travail où les métiers se transforment, disparaissent, se créent. Au-delà des choix individuels de trajectoire professionnelle, l’individualisation de la formation questionne la personnalisation des parcours et son articulation avec le plan de développement des compétences piloté par l’employeur et engage à un processus de co-construction.
Avec la fin des critères d’imputabilité et de financement, la définition du « plan de développement des compétences » est pour une organisation un investissement stratégique, libre en lien direct avec ses besoins, dont elle doit assumer – seule ? – la dépense et en projeter la rentabilité. La formation reste cependant encadrée en termes d’obligation de l’employeur par exemple au travers d’entretiens professionnels qui sont un temps d’expression des projets de formation et d’évaluation des impacts.
Les récents textes indiquent que la formation peut maintenant être réalisée « en tout ou partie à distance » et « en situation de travail ». L’ouverture de la définition de l’action de formation qui requestionne les méthodes d’enseignement et d’apprentissage et met à l’honneur la FOAD et l’AFEST, engage également l’implication de l’apprenant comme étant un des moteurs les plus efficaces de l’apprentissage.
Désormais, les éléments d’évaluation valorisent prioritairement l’atteinte des objectifs en termes de compétences et d’employabilité sans rechercher la conformité sur le plan des moyens pédagogiques et des conditions de réalisation de la formation. La question de l’impact et des résultats doit donc être pensée dès la conception de l’offre de formation et faire systématiquement l’objet d’une évaluation post-formation.
Cette loi, active depuis 2019 dans le secteur privé, vise, et c’est légitime, avant tout l’employabilité et le retour à l’emploi des personnes les moins qualifiées voire les plus précaires. L’enjeu pour les structures de santé, qu’elles soient publiques ou privées, est que le développement des compétences nécessaires à leur activité risque d’être mis à mal si la réflexion sur la formation ne se recentre pas sur la recherche du sens, des enjeux et l’exigence de professionnalisme.
Pour les prestataires de formations cela engage à repenser leur offre (rôle par rapport à l’AFEST, le développement des APP, l’analyse d’impact, la FOAD…) voire leur modèle économique, sachant qu’entre marché libre et réglementé une prime à la qualité et aux résultats devrait être privilégiée.
La pertinence de ces changements de paradigme n’est pas remise en cause, elle conduit à plus de qualité et d’efficacité dans l’offre de formation. Cependant associés aux réformes sanitaires et aux inflexions déjà engagées pour le DPC des professions médicales et paramédicales, cela induit une transformation profonde et durable des modèles et modalités de formation, et donc des entreprises qui les portent, ainsi que des relations entre les différentes parties prenantes : organismes, entreprises, financeurs et apprenants. A eux d’(inter) agir pour que la reconfiguration de ces relations aille dans le sens d’une potentialisation de ses effets et non pas d’une fragilisation.