Les pratiques avancées infirmières en psychiatrie : notre série vous informe
Vers la création d’un département des sciences infirmières
En cette année 2019 en France, les pratiques avancées infirmières sont enfin entrées au cœur des préoccupations des professionnels, des politiques, des universitaires, du monde sanitaire tant à l’hôpital que dans le secteur libéral. Les textes réglementaires en psychiatrie vont voir le jour et les publications fleurissent dans de nombreuses revues professionnelles et scientifiques. Les discussions au cœur des pratiques fusent et se déchaînent. Nous sommes entrés dans une nouvelle ère où nous pouvons espérer vivre la naissance des sciences infirmières alors que la filière infirmière était jusqu’à lors peu existante en France. Seule l’université d’Aix-Marseille a fondé son département de sciences infirmières. Le premier grand enjeu sera donc de créer et de généraliser le département des sciences infirmières dans les universités à la fois différentes et complémentaires des sciences médicales et qui devront intégrer la pratique avancée comme un nouveau métier.
Le GRIEPS a souhaité être présent tant par la réflexion, la recherche, que dans ses dispositifs de formation pour accompagner ce mouvement et participer à sa réussite. Durant ce premier semestre, il a produit par l’intermédiaire de ses experts, des écrits dont l’objectif premier a été d’être force de propositions.
La contribution des experts du GRIEPS
Dans la première actualité que nous avons présentée sur le thème des Infirmiers.ières en Pratiques Avancées (IPA) en février 2019, Michel Combret a brossé le contexte politique des pratiques avancées en psychiatrie en soulignant la nécessité qu’elles s’appuient sur un socle de savoirs des professionnels travaillant en psychiatrie. Il rappelait combien le GRIEPS est conscient de ces enjeux notamment dans la construction de son offre de formation. Puis notre second expert, Jean-Michel Bourelle dans une actualité d’avril 2019, a rappelé le statut des pratiques avancées en France pour dessiner ensuite les contours de leur légitimité avec notamment la nécessité d’évaluer le risque d’une autonomie partielle voire assujettie à la décision médicale. Il a souligné également que les pratiques avancées en psychiatrie n’ont de sens qu’avec l’appui d’une expertise clinique affirmée. L‘actualité de mai 2019 de notre troisième expert, Guillaume Saucourt, s’est alors surtout attachée à brosser les missions de l’IPA :
- pertinence du renouvellement et de l’adaptation de la prescription de traitements utilisés en psychiatrie,
- évaluation de l’état de santé du patient,
- prescription d’examens nécessaires à la surveillance des effets du traitements,
- mise en œuvre d’actions de prévention et d’éducation thérapeutique,
- conduite d’entretien de première ligne et de gestion de crise,
- leadership clinique,
- recherche…
Ces réflexions mettent l’accent tant sur les enjeux, les compétences et la légitimé des Infirmiers.ières en Pratiques Avancées que sur des points de vigilance à travailler.
Réflexion sur l’intégration des IPA
Aussi cette quatrième actualité, loin de conclure le thème, aspire à continuer la réflexion sur un élément central qu’est l’intégration des IPA dans les services, les pôles, les GHT…
C’est un enjeu crucial de la réussite de ce projet national. Quel rôle, quelle place, quelle fonctions vont épouser les Infirmiers.ières en Pratiques Avancées ? Quels liens vont-ils entretenir avec les médecins, les cadres, les infirmiers ? Sous quel responsable hiérarchique vont-ils exercer ? Quelles expertises cliniques pourront-ils mobiliser ?
Les IPA, tel que cela se dessine, vont conjuguer des compétences d’expertise clinique et des compétences de leadership, ce qui est heureux. Mais comment se positionner face au leadership clinique du cadre de santé ? Comment l’institution va-t-elle travailler les différenciations sans reléguer les cadres uniquement dans une fonction organisationnelle ?
Les Infirmiers.ières en Pratiques Avancées vont très certainement être une aide précieuse et essentielle dans la collaboration avec les médecins, les psychiatres sans pour autant devenir « leur petite main ». Mais alors, il sera très important de travailler, de tisser une nouvelle forme de coopération au service du patient et de la communauté. Or, on sait aujourd’hui dans les usages, que des difficultés existent parfois dans le fonctionnement du binôme cadre-médecin qu’il serait très dommageable de reproduire ailleurs.
Une enquête réalisée auprès de 120 cadres de santé (Revillot, 2017) a montré que la traduction dans les unités de soins de la pluralité des conceptions de la santé dépend du travail pluridisciplinaire, de la cohérence et de la complicité des binômes cadre-médecin alors que les conceptions du patient évoluent dans son parcours de soin en fonction des compétences des soignants (centrées justement sur cette pluralité).
La formation universitaire des IPA se met en place actuellement et elle nécessite déjà de s’intéresser aux critères de recrutement de ces nouveaux professionnels. Mais leur intégration dans les GHT, puis dans le libéral, va nécessiter un travail de réflexion et d’organisation encore plus ardu.
Le GRIEPS conscient de ces enjeux, facteurs de réussite du projet, va s’attacher dans les mois qui viennent à prolonger son travail de réflexion et à proposer des dispositifs de formation qui vont aider et accompagner cette intégration.